I. En fait
A, ressortissant français sans domicile fixe et sans profession, a déjà fait l’objet de trois condamnations judiciaires pour vol simple, dommages à la propriété d’importance mineure, utilisation frauduleuse d’un ordinateur, violation de domicile et rupture de ban.
Le 12 avril 2023, A est interpellé et placé en détention provisoire à la suite d’une ordonnance du Tribunal des mesures de contrainte de la République et canton de Genève (TMC). Il est reproché à A d’avoir commis un dommage à la propriété, une violation de domicile et des vols par effraction. Il est également soupçonné de rupture de ban puisqu’il fait l’objet d’une expulsion judiciaire du territoire suisse depuis le 18 novembre 2022 pour une durée de cinq ans. A a admis une part importante des faits reprochés.
Le 2 juin 2022, le Ministère public a sollicité du TMC le placement en détention provisoire de A pour une durée de deux mois. Le même jour, A a fait parvenir au TMC ses déterminations dans lesquelles il requiert la récusation de tout magistrat du TMC ayant, avant son entrée en fonction, exercé la fonction de procureur et conclut à sa libération immédiate.
Par ordonnance du 5 juin 2023, le juge intimé a, au nom du TMC, refusé la libération de A, ordonné son placement en détention provisoire jusqu’au 1er août 2023 et l’a débouté de toutes ses autres conclusions. Il a par ailleurs transmis le dossier à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (CPR) pour qu’elle statue sur la demande de récusation formulée par A.
Le 6 juin 2023, A a recouru contre l’ordonnance du TMC. Par arrêt du 22 juin 2023, la CPR a rejeté la demande de récusation de A ainsi que son recours s’agissant de sa détention provisoire.
A forme recours en matière pénale au Tribunal fédéral (TF) contre cet arrêt.
II. En droit
Après avoir admis la recevabilité du recours (c. 1), le TF s’intéresse au grief principal du recourant. Ce dernier reproche à la CPR d’avoir rejeté sa requête de récusation formée contre le juge du TMC ayant statué sur sa détention (c. 2).
Le TF commence son raisonnement en rappelant la teneur de l’art. 56 let. f CPP, à savoir qu’un magistrat est récusable notamment lorsque d’autres motifs comme un rapport d’amitié étroit ou d’inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre suspect de prévention. Cette disposition a la portée d’une clause générale englobant tous les motifs de récusation non prévus aux lettres précédentes. En outre, l’impartialité subjective d’un magistrat est, jusqu’à preuve du contraire, présumée (ATF 136 III 605, c. 3.2.1 ; TF 1B_40/2023 du 17.5.2023, c. 2.3) (c. 2.1.1).
Le TF rappelle également que des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention. En effet, seules des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs du magistrat, peuvent fonder une suspicion de partialité. Le TF souligne que la fonction judiciaire oblige à se déterminer rapidement sur des éléments contestés et délicats. Une procédure de récusation ne doit donc pas avoir pour but de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l’instruction et de remettre en cause les décisions incidentes prises par la direction de la procédure (ATF 143 IV 69, c. 3.2) (c. 2.1.2).
En l’espèce, la CPR a soulevé dans son arrêt que, faute d’éléments objectivés, le seul fait que le juge intimé ait anciennement occupé la fonction de procureur ne le rendait pas partial. En outre, le refus par ce dernier de donner suite aux demandes du recourant de parloir et d’enregistrement des débats ne fonde pas non plus un motif de récusation, ce d’autant plus que le recourant n’a pas remis ces décisions en cause (c. 2.2).
Le TF relève qu’il ressort du dossier que le juge intimé a anciennement occupé la fonction de procureur. Dans le cadre de cette activité passée, il a certes requis des placements en détention avant jugement. Cependant, un procureur ne formule une telle demande que lorsque les soupçons et les motifs de détention ont été confirmés par l’administration des preuves (cf. art. 224 al. 2 CPP). Le simple fait qu’un juge ait auparavant exercé la fonction de procureur ne permet pas de considérer que ce dernier présente un « biais en faveur de la détention ». En effet, lorsqu’un juge entre en fonction, il s’affranchit des éventuelles inclinations de ses anciennes fonctions (cf. ATF 138 I 1, c. 2.3) tout comme de celles de son parti politique (cf. ATF 138 I 1, c. 2.4) et statue en toute indépendance et impartialité. En outre, si l’on suit le raisonnement de A, il conviendrait de récuser tout magistrat qui aurait précédemment exercé l’activité de défenseur, au motif qu’il présente pour sa part un « biais en défaveur de la détention » (cf. ATF 138 I 1, c. 2.3) (c. 2.3.2).
Au vu de ce qui précède, le TF estime qu’A n’a pas réussi à soulever des éléments permettant objectivement de retenir une apparence de prévention du magistrat intimé. La CPR n’a donc pas violé le droit fédéral en écartant la requête de récusation formée par le recourant. Le TF rejette ainsi ce grief, ainsi que les autres griefs du recourant (c. 2.4 et 4).