Les articles en procédure pénale
Pas de retrait de l’appel en raison de l’usage du droit de refuser de collaborer
La prévenue qui, lors des débats d’appel, fait croire à des problèmes d’ouïe qui l’empêchent de comprendre certaines questions ne fait en réalité qu’exercer son droit de refuser de collaborer (art. 113 al. 1 CPP). La juridiction d’appel ne peut pas considérer qu’elle se désintéresse de la procédure et appliquer par analogie la fiction du retrait de l’appel prévue à l’art. 407 al. 1 CPP.
La pertinence des instruments de pronostic médico-légaux pour l’évaluation du risque de récidive
Les instruments de pronostic médico-légaux actuariels prennent en considération de manière limitée les changements biographiques influençant le risque de récidive, dont l’âge. Les outils de pronostic SPJ (Structured Professional Judgment), tels que FOTRES, tiennent en revanche compte de ces éléments évolutifs mais sont standardisés, de sorte qu’ils ne peuvent fonder à eux seuls une expertise visant à évaluer le risque de récidive (ici dans le cadre d’une conversion de mesure selon l’art. 56 al. 3 CP). Dès lors que ces outils reposent sur une généralisation de données empiriques, leurs résultats revêtent un rôle d’indice, parmi d’autres, dans le cadre de l’évaluation du risque. Les résultats doivent en tout état de cause être corroborés au moyen d’une analyse différenciée dans chaque cas d’espèce.
L’exercice préalable de la fonction de procureur par un juge ne constitue pas un motif suffisant pour fonder une requête de récusation
Le simple fait que le juge du Tribunal des mesures de contrainte ait, au cours de sa carrière, exercé la fonction de procureur ne constitue pas un motif de récusation suffisant (art. 56 CPP). Il faut, au contraire, partir du principe que lorsqu’un juge entre en fonction, il s’affranchit des éventuelles inclinations liées à ses anciennes fonctions pour statuer avec indépendance et impartialité.
Exploitation d’un enregistrement vidéo d’un établissement pénitentiaire et entraide judiciaire nationale
Les dispositions relatives à l’entraide judiciaire nationale priment les règles relatives au séquestre et à l’obligation de dépôt. Tant pour des raisons de sécurité juridique que pour l’intérêt public au bon déroulement de la procédure, les autorités pénales ne peuvent pas choisir, en lieu et place de la voie de l’entraide nationale prévue par la loi, celle des mesures de contrainte procédurales, dans le but d’obtenir et de conserver des moyens de preuve dans un cas particulier. Dans le cas présent, le Tribunal fédéral s’est toutefois prononcé en faveur de l’exploitabilité des preuves obtenues illégalement conformément à l’art. 141 al. 2 CPP.
Preuve d’envoi d’un acte en temps utile : une photo accompagnée de ses métadonnées ne suffit pas
Une photographie accompagnée de ses métadonnées, sur laquelle apparaissent l’enveloppe avec indication du destinataire du pli et la boîte postale en arrière-plan ne permet pas d’apporter la preuve d’expédition d’un acte de procédure en temps utile, à la différence d’une vidéo qui peut être apte à établir que le pli contenant le recours a bien été fermé et glissé dans la boîte postale à la date et à l’heure indiquées.
Disparition du prévenu et retrait implicite de l’appel
Le prévenu qui, condamné en première instance, demande à son défenseur de faire appel puis disparaît sans lui laisser d’adresse ni d’autre moyen de le contacter adopte un comportement contradictoire qui permet à la juridiction d’appel de considérer qu’il a retiré son appel de manière tacite, même si cette situation n’est pas prévue par la liste de l’art. 407 al. 1 CPP.
Le juge du fond est compétent pour traiter l’indemnisation d’une détention illicite (art. 431 CPP) subie sous la forme d’un retour en exécution d’une précédente peine en application de l’art. 237 CPP
Lorsqu’un prévenu en libération conditionnelle est placé en détention pour de nouvelles infractions en application de l’art. 237 al. 1 CPP sous la forme d’un retour en exécution d’une peine, le juge du fond saisi dans le cadre de la procédure pénale pendante est compétent pour se prononcer sur l’indemnité fondée sur l’art. 431 al. 1 CPP. Les principes d’économie de procédure et de cohérence s’opposent à ce que le prévenu se retrouve à saisir parallèlement les autorités cantonales compétentes en matière de responsabilité de l’État pour être indemnisé de ce chef.
La qualité de partie du plaignant dans la procédure de récusation
L’autorité statuant sur la demande de récusation a l’obligation (et non pas seulement la compétence) d’intégrer la (les) partie(s) adverse(s) à la procédure. Cette obligation découle de manière directe du droit à un tribunal établi par la loi et de manière indirecte du principe de l’unité de la procédure. Celui qui est touché dans son droit à un tribunal établi par la loi et qui dispose ainsi de la qualité pour recourir, au sens de l’art. 81 al. 1 LTF, doit pouvoir participer à la procédure devant toutes les autorités cantonales inférieures, en vertu de l’art. 111 al. 1 LTF.
Exploitabilité des enregistrements de vidéosurveillance par des particuliers et respect des principes de transparence et de proportionnalité
L’utilisation par des particuliers d’une caméra de vidéosurveillance qui filme le domaine public est soumise à la loi sur la protection des données (LPD). Les enregistrements vidéo ne sont licites que si la vidéosurveillance respecte le principe de transparence (art. 4 al. 4 LPD) et le principe de proportionnalité (art. 4 al. 2 LPD). Il revient à l’autorité d’instruction de déterminer avec précision si ces principes sont respectés.
L’exploitation de moyens de preuve récoltés par vidéosurveillance sur un parking d’aéroport
La vidéosurveillance d’un parking d’aéroport constitue vraisemblablement un traitement de données licite au regard de la LPD. En effet, en l’espèce, le prévenu n’a pas démontré que le volume de données récoltées, leur traitement et les personnes ayant accès aux enregistrements étaient problématiques. Au contraire, il apparaît plutôt que l’atteinte à la personnalité du prévenu provoquée par la prise de vue des caméras du parking était justifiée par les divers intérêts privés de l’exploitant (art. 13 al. 1 LPD). Les enregistrements effectués peuvent donc être considérés comme licites et l’absence de consentement du prévenu n’y change rien. En conséquence, les enregistrements sont exploitables au sein d’une procédure pénale sans qu’il ne faille procéder à la pesée d’intérêts de l’art. 141 al. 2 CPP.
Un comportement trop passif et peu communicatif pendant plusieurs années peut entraîner l’aliénation du lien de confiance entre un prévenu et son défenseur d’office
Le CPP prévoit que la défense peut être compromise non seulement en cas de violation objective des devoirs du défenseur, mais aussi lorsque le rapport de confiance est considérablement perturbé. La rupture de la relation de confiance doit être étayée et objectivée par des indices concrets. Le Tribunal fédéral considère qu’il est objectivement compréhensible qu’un prévenu perde progressivement la confiance nécessaire dans son défenseur d’office lorsque celui-ci a un comportement trop passif et peu communicatif pendant plusieurs années.
Refus d’une nouvelle audition d’enfants dans le cadre d’une affaire d’abus sexuels et préjudice irréparable (art. 394 let. b CPP)
Un recours contre le refus du ministère public d’ordonner un acte d’instruction n’est recevable que s’il existe un préjudice juridique irréparable au sens de l’art. 394 let. b CPP. Un tel préjudice existe lorsque le refus d’instruire porte sur un moyen de preuve qui risque de disparaître. Tel peut être le cas lorsque le ministère public refuse d’ordonner une seconde audition d’enfants en bas âge dans le cadre d’une instruction portant sur des faits d’abus sexuels.