Ryan Gauderon

Ryan Gauderon

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Ryan Gauderon est doctorant auprès du Centre de droit pénal de l’Université de Lausanne. Il rédige actuellement sa thèse de doctorat en procédure pénale sur l’investigation secrète (art. 285a ss CPP) sous la direction du Professeur Alain Macaluso. Il termine actuellement sa formation d'avocat auprès d'une étude lausannoise, après avoir fonctionné durant quatre ans comme assistant-diplômé des Profs. Alain Macaluso et Camille Perrier Depeursinge. Aux côtés de ses activités académiques, Ryan Gauderon est officier à la Justice militaire et fonctionne comme greffier auprès du Tribunal militaire d'appel.

Ses recherches s’orientent particulièrement vers la procédure pénale, le droit pénal spécial et le droit pénal économique.

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Affaire Platini/Blatter : récusation de l’ensemble de la Cour d’appel du TPF

Une apparence objective de partialité doit être retenue à l’encontre de l’ensemble des membres de l’autorité d’appel lorsque son propre président, récusé d’office, a été entendu comme témoin en première instance sur un point de fait contesté par les parties, et sur lequel l’instruction en seconde instance risque de porter. Cela vaut d’autant plus si les déclarations de ce président font parallèlement l’objet d’une instruction pénale pour faux témoignage. En pareilles circonstances, l’impartialité et l’indépendance requises ne sont pas données, en particulier sous l’angle de la libre appréciation des preuves du tribunal.

Les résultats d’une surveillance secrète mise en œuvre à l’étranger et transmis au procureur suisse ne constituent pas des « découvertes fortuites » soumises à autorisation du Tribunal des mesures de contrainte

L’autorité de poursuite pénale suisse qui obtient par la voie de l’entraide judiciaire des résultats de mesures de surveillance secrètes contre le prévenu, en l’espèce des communications opérées aux Etats-Unis sur l’application ANOM (fausse application de chat créée par le FBI notamment), ne doit pas procéder comme en cas de « découvertes fortuites » (art. 278 CPP). Le Tribunal des mesures de contrainte n’est pas compétent pour autoriser l’exploitation de ces preuves. Il appartient au juge du fond de se prononcer sur l’exploitabilité de telles preuves obtenues auprès d’autorités étrangères.

Violation de l’obligation d’entretien (art. 217 CP) : le juge pénal doit toujours établir concrètement la capacité du débiteur de s’acquitter de la contribution d’entretien (condition objective de punissabilité)

Une condamnation pour violation de l’obligation d’entretien (art. 217 CP) suppose que le débiteur dispose de moyens suffisants pour s’acquitter de ses obligations, ce qui constitue une condition objective de punissabilité. Dans le cadre de cet examen, le juge pénal doit procéder à une analyse « concrète » de la capacité financière du prévenu, en se référant si besoin aux éléments établis par le juge civil. Entrent dans la capacité financière concrète du prévenu tant ses moyens actuels que les possibilités de gain qui lui sont offertes et qu’il pourrait accepter.

Délit de chauffard : accélérer pour faire plaisir à un enfant n’est pas un motif suffisant pour renverser la présomption du caractère intentionnel prévue par l’art. 90 al. 3 et 4 LCR

Un important dépassement de vitesse tombant objectivement sous le coup de l’art. 90 al. 3 et 4 LCR ne peut pas être réprimé sur la base de l’art. 90 al. 2 LCR du seul fait que le conducteur a décidé d’accélérer pour « faire plaisir à un enfant » qui souhaite tester la puissance du moteur. Le fait que le conducteur n’est resté que huit secondes au-delà du seuil de l’art. 90 al. 4 LCR n’y change rien. Par son comportement, le conducteur a au contraire démontré qu’il a intentionnellement dépassé largement la limite de vitesse autorisée et s’est accommodé du fait de faire courir un grand risque d’accident à autrui. L’autorité précédente a par conséquent outrepassé la marge de manœuvre limitée dont elle dispose dans le cadre de l’art. 90 al. 3 et 4 LCR.

Détention de moins de 10 grammes de cannabis : pas de confiscation du stupéfiant

La simple détention de moins de 10 grammes de cannabis pour sa propre consommation n’est pas punissable (art. 19b LStup). Par conséquent, aucune saisie ni confiscation du stupéfiant n’entre en ligne de compte. En effet, la confiscation d’un objet dangereux selon l’art. 69 CP suppose un lien direct avec un comportement pénalement interdit. Le fait que la détention de quantités minimes peut hypothétiquement précéder ou succéder la commission d’une infraction à la LStup (la culture ou la consommation notamment) ne suffit pas à prononcer la confiscation.

Le juge du fond est compétent pour traiter l’indemnisation d’une détention illicite (art. 431 CPP) subie sous la forme d’un retour en exécution d’une précédente peine en application de l’art. 237 CPP

Lorsqu’un prévenu en libération conditionnelle est placé en détention pour de nouvelles infractions en application de l’art. 237 al. 1 CPP sous la forme d’un retour en exécution d’une peine, le juge du fond saisi dans le cadre de la procédure pénale pendante est compétent pour se prononcer sur l’indemnité fondée sur l’art. 431 al. 1 CPP. Les principes d’économie de procédure et de cohérence s’opposent à ce que le prévenu se retrouve à saisir parallèlement les autorités cantonales compétentes en matière de responsabilité de l’État pour être indemnisé de ce chef.

La condamnation d’un Conseiller d’Etat et de son chef de cabinet à l’infraction d’acceptation d’un avantage (art. 322sexies CP)

Les infractions d’octroi et d’acceptation d’un avantage (art. 322quinquies et 322sexies CP) sont des infractions dites « miroir », mais qui restent autonomes. Pour l’agent public, il importe peu de savoir si le corrupteur lui offre un avantage indu dans l’intention de l’influencer dans l’accomplissement des devoirs de sa charge. Dès que l’agent public a conscience du caractère indu de l’avantage qu’il accepte, que cet avantage est objectivement susceptible d’influencer l’agent public dans l’exercice de ses fonctions et que l’agent s’accommode de le recevoir en raison de sa qualité de fonctionnaire, l’infraction est réalisée. Par conséquent, il n’existe pas de parallélisme entre l’illicéité de l’octroi de l’avantage indu et celle de son acceptation par l’agent public.

Écoutes téléphoniques : une durée de 17 mois pour requérir l’autorisation d’une découverte fortuite est largement excessive, même si le délai de 24 heures est une prescription d’ordre 

En cas de découverte fortuite issue d’une surveillance active d’un raccordement téléphonique (art. 269 ss CPP), l’autorité de poursuite pénale doit immédiatement ordonner la surveillance et requérir l’autorisation du tribunal des mesures de contrainte (TMC) pour l’exploiter contre un nouveau prévenu (art. 278 CPP). Un délai de 17 mois entre l’identification de la découverte fortuite et la requête au TMC est excessif, de sorte que le TMC doit refuser la requête en pareil cas. En conséquence, l’ensemble des opérations d’instruction effectuées sur cette base sont absolument inexploitables et doivent être écartées du dossier pénal, puis détruites à l’issue de la procédure.

Placer un radar routier sur un terrain privé sans l’accord de son propriétaire est un acte autorisé par la loi (art. 14 CP) et ne rend pas la mesure illicite

Lorsqu’un excès de vitesse est constaté au moyen d’un radar, le conducteur peut demander la production des documents techniques le concernant, ainsi que le procès-verbal de prise de mesure, pour s’assurer de la conformité de cette dernière. Refuser une telle réquisition emporte violation du droit d’être entendu du conducteur. Par ailleurs, les policiers qui placent un radar sur le terrain privé d’un tiers, par hypothèse sans son consentement, agissent dans le cadre de leur fonction, de sorte que leur acte doit être couvert par l’art. 14 CP. Par conséquent, les preuves obtenues par ce biais ne sont pas illicites au sens de l’art. 141 al. 2 CPP.

Mesures techniques de surveillance secrètes : les preuves récoltées entre l’échéance de la durée de la mesure et la demande de prolongation tardive du ministère public sont absolument inexploitables

Une demande de prolongation d’une mesure technique de surveillance déposée un jour après l’échéance de la durée précédemment accordée ne peut couvrir la période qui sépare l’échéance précédente de celle-ci. Les preuves récoltées durant ce laps de temps sont absolument inexploitables, nonobstant une autorisation rétroactive du Tribunal des mesures de contrainte. Ce dernier doit se limiter à accorder la prolongation au jour de la réception de la demande du ministère public. 

Hors circonstance aggravante, le dépassement par la droite sur l’autoroute doit être sanctionné d’une simple amende d’ordre de CHF 250.-

La jurisprudence fédérale établie retenant que tout dépassement par la droite sur l’autoroute ou semi-autoroute avec rabattement sur la gauche est systématiquement constitutif d’une violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR) et ayant pour conséquence un retrait de permis automatique de trois mois au moins (art. 16c al. 2 LCR) ne peut être maintenue. La modification de l’art. 36 al. 5 OCR et son pendant dans l’OAO (Annexe 1 ch. 314.3) commande depuis le 1er janvier 2021 de se limiter exceptionnellement au prononcé d’une simple amende d’ordre de CHF 250.- lorsqu’aucune circonstance aggravante ne permet de retenir que le dépassement par la droite a causé une mise en danger abstraite accrue.

Diffamation (art. 173 ch. 1 CP) : l’avocat n’est pas « n’importe quel tiers » lorsque son client lui confie des propos attentatoires à l’honneur de la partie adverse

Les propos attentatoires à l’honneur tenus par le client lors d’un entretien avec son avocat ne sont en principe pas constitutifs d’une atteinte à l’honneur au sens de l’art. 173 ch. 1 CP. Le conseil juridique ne peut effectivement être considéré comme un simple « tiers » au sens de cette disposition, vu le climat de confiance nécessaire qui doit exister entre avocat et client. Une diffamation peut toutefois être retenue lorsque les propos tenus sont sans lien avec l’affaire pour laquelle intervient l’avocat et que ceux-ci ne tendent qu’à exposer la personne visée au mépris.