Les articles en procédure pénale
Nouvel art. 364b al. 2 CPP : séparation des fonctions entre le juge de la détention et le juge du fond
Seule la direction de la procédure de la juridiction d’appel est compétente pour prolonger la détention pour des motifs de sûreté dans le cadre d’un recours contre une décision ultérieure. Le texte de l’art. 364b al. 2 CPP est clair. Comme les mesures prononcées par un jugement de première instance et celles prononcées dans le cadre de décisions ultérieures n’ouvrent pas les mêmes voies de droit (les premières pouvant faire l’objet d’un appel, les secondes n’étant susceptibles que du recours), la séparation des fonctions ne prévaut qu’en matière de décisions ultérieures. Cette dichotomie est critiquée par la doctrine. L’introduction d’un alinéa 3 à l’art. 365 CPP prévu par la révision actuelle du CPP pourrait y pallier en dépit de la jurisprudence fédérale.
Sonorisation en prison : les visites au parloir peuvent être enregistrées à l’aide de moyens techniques de surveillance (art. 280 ss CPP) lorsqu’ils ne visent pas le détenu
Lorsque des personnes ayant le statut de prévenues viennent rendre visite à des détenus également prévenus mais dans une procédure pénale distincte, le ministère public peut mettre en place une mesure technique de surveillance au parloir de la prison sans violer l’art. 281 al. 3 let. a CPP. Tant que les prévenus dans la procédure au sein de laquelle la mesure technique de surveillance est ordonnée ne sont pas en détention, rien n’empêche la mise en place d’une telle mesure technique de surveillance.
Procédures pénale et d’entraide internationale parallèles : recours en matière pénale ou de droit public contre l’accès au dossier ?
Lorsque sont conduites en parallèle en Suisse, dans un même complexe de faits, une procédure d’entraide internationale et une procédure pénale, accorder un accès illimité au dossier de la seconde peut avoir pour conséquence de contourner les règles de la première. Le risque est particulièrement important lorsque l’État étranger requérant l’entraide est partie plaignante ou qu’il contrôle l’entité qui a cette qualité. Se pose alors la question de savoir quel recours est ouvert au Tribunal fédéral contre la décision portant sur l’accès au dossier de la procédure pénale par la partie plaignante.
Le prélèvement des empreintes digitales et d’un échantillon ADN ainsi que l’établissement du profil ADN suite à une manifestation pacifique dans le but de prévenir d’éventuelles infractions futures sont disproportionnés
Le prélèvement des empreintes digitales et d’un échantillon d’ADN ainsi que l’établissement d’un profil ADN sont autorisés pour l’élucidation d’infractions futures s’il existe des indices sérieux et concrets que le prévenu est impliqué dans d’autres infractions d’une certaine gravité. Les conditions de l’art. 36 Cst. reprises à l’art. 197 al. 1 CPP doivent être respectées. Tel n’est pas le cas lorsque lesdites mesures de contrainte sont mises en œuvre à l’encontre d’un prévenu qui a participé à une manifestation pacifique durant laquelle aucun acte de violence n’a été commis.
La compétence du juge unique selon l’art. 19 al. 2 CPP
La compétence d’un juge unique se limite strictement au cadre légal de l’art. 19 al. 2 CPP. La décision qui a pour effet de rendre exécutoire une privation de liberté globale de plus de deux ans ne relève ainsi pas de la compétence du juge unique, même si la décision ne contient pas elle-même une telle peine.
Les participants visés par une plainte pénale pour violation de domicile
Quand une infraction continue est consommée, mais pas encore achevée, la plainte pénale couvre également les faits se déroulant après son dépôt. La plainte vise ainsi tous les participants à l’infraction, notamment ceux qui interviennent après qu’elle soit déposée, à condition que le comportement auquel ils prennent part leur soit imputable conformément aux règles matérielles de la participation. En ce sens, la plainte pénale vaut également contre les coauteurs assumant un rôle décisif et les complices prêtant assistance lors de l’exécution de l’infraction continue dans une même propriété. En revanche, les auteurs directs juxtaposés (Nebentäter) commettant l’infraction avec une intention indépendante, ne peuvent se voir imputer le comportement des inconnus visés par la plainte pénale.
La qualité pour recourir au Tribunal fédéral des autorités administratives cantonales chargées de la poursuite des contraventions
Les autorités administratives cantonales compétentes en matière de contraventions (art. 17 CPP) disposent des attributions du ministère public (art. 357 al. 1 CPP). Elles n’ont cependant pas qualité pour recourir en matière pénale au Tribunal fédéral. En effet, elles n’ont pas un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée découlant de l’exercice de l’action publique et ne peuvent donc pas être assimilées à l’accusateur public au sens de l’art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF.
Le complétement factuel de l’acte d’accusation devant la juridiction d’appel
Lorsque la cause est entre les mains de la juridiction d’appel, l’interdiction de la reformatio in peius lui défend d’inviter le ministère public à procéder à un complétement factuel de l’acte d’accusation et, par là même, de rendre une déclaration de culpabilité étendue par rapport à celle du jugement attaqué du tribunal de première instance. Si l’autorité de poursuite procède toutefois en ce sens, l’art. 333 al. 2 CPP n’est pas applicable devant la juridiction d’appel, sauf à méconnaître le droit à un double degré de juridiction garanti par la LTF (art. 80 al. 2), le droit constitutionnel (art. 32 al. 3 Cst.) et le droit international des droits de l’homme (art. 2 par. 1 Protocole n° 7 CEDH).
L’échéance d’un titre de détention au cours d’une détention pour des motifs de sûreté et les conséquences de sa prolongation tardive
Une ordonnance provisoire de prolongation de la détention ne constitue pas un titre juridiquement valable justifiant une détention pour des motifs de sûreté. L’absence temporaire d’un titre de détention dans le cadre d’une procédure d’appel n’entraîne pas automatiquement une libération immédiate. Une violation des règles de procédure relatives à la détention avant jugement peut être réparée d’emblée par une constatation de l’irrégularité, une admission partielle du recours sur ce point, la mise à la charge de l’État des frais de justice et l’octroi de pleins dépens au recourant.
Le tribunal des mesures de contrainte ne peut pas ordonner la détention provisoire pour une durée supérieure à celle requise par le ministère public
Le tribunal des mesures de contrainte outrepasse ses compétences s’il ordonne la mise en détention du prévenu pour une durée plus longue que celle requise par le ministère public dans ses conclusions. De la même manière, la répartition des rôles entre le ministère public et le tribunal des mesures de contrainte n’est pas respectée si celui-ci prononce la détention provisoire alors que le ministère public n’a requis que des mesures de substitution. Il est en revanche admissible que le tribunal des mesures de contrainte prononce des mesures de substitution plus incisives que celles requises par le ministère public.
La précision de l’acte d’accusation en cas d’infractions répétées dans un certain laps de temps et le calcul du « délai raisonnable » à l’aune de l’art. 5 CPP
Le principe d’accusation est respecté même si l’acte d’accusation situe les faits incriminés dans un laps de temps relativement étendu (en l’espèce trois ans et demi) lorsqu’il s’agit d’infractions commises à répétition. Il importe que le prévenu sache suffisamment précisément ce qui lui est reproché et que ses droits procéduraux soient assurés. Selon l’atteinte qu’elles provoquent sur le prévenu, les mesures de substitution à la détention peuvent mener à l’application de l’art. 5 al. 2 CPP. Pour déterminer si l’autorité a violé le principe de célérité, la méthode du « retard net » (soustraire les 90 jours de l’art. 84 al. 4 CPP sur la durée totale) n’est pas autorisée. Ainsi, une attente de 12 mois et demi pour obtenir l’exposé des motifs ne peut pas être réduite à 9 mois et demi.
Le cessionnaire d’une créance fondée sur l’infraction préalable lésé en raison d’un blanchiment d’argent postérieur à la cession
Le Tribunal fédéral précise pour la première fois que l’art. 305bis CP (blanchiment d’argent) protège également les intérêts patrimoniaux de la personne qui, bien que n’étant pas elle-même lésée par l’infraction préalable, est la cessionnaire des prétentions en dommages-intérêts résultant de l’infraction préalable.