Les articles en procédure pénale
Le maintien au dossier de preuves issues de recherches secrètes illicites (art. 298a ss CPP) ne crée pas de préjudice irréparable au sens de l’art. 93 LTF
Dès l’existence de soupçons d’infraction portée à la connaissance de l’autorité pénale, le CPP s’applique aux mesures de surveillances ordonnées sur cette base. La conclusion d’un achat fictif de cocaïne auprès de la personne soupçonnée tombe ainsi sous le coup des art. 298a ss CPP. Faute de disposition expresse du CPP sur le sort des preuves obtenues grâce aux recherches secrètes illicites, les dispositions générales s’appliquent (art. 141 al. 2 CPP). Par conséquent, le maintien de telles preuves au dossier ne constitue pas un préjudice irréparable (art. 93 LTF).
L’admissibilité de la preuve du respect des délais légaux par un enregistrement vidéo
Un enregistrement vidéo peut, en principe, apporter la preuve qu’un acte judiciaire a été déposé dans une boîte aux lettres de La Poste Suisse en temps utile et donc renverser la présomption de tardiveté fondée sur le tampon postal.
Jonction de procédures (indépendante ultérieure et ordinaire) confirmée par le TF et rappel du principe de la légalité en matière de conversion de mesures pénales
Une procédure indépendante en matière de mesures (art. 363 ss CPP) initiée pour le prononcé d’un internement peut être jointe avec une procédure pénale ordinaire ouverte ultérieurement contre la même personne ayant également pour objet son internement. Si un appel est déposé contre le jugement de 1ère instance qui en résulte, l’autorité d’appel est compétente pour statuer globalement sur l’internement. Par ailleurs, faute de disposition pénale expresse qui la prévoit, la conversion d’un traitement ambulatoire (art. 63 ss CP) en un internement (art. 64 ss CP) n’est pas possible (cf. art. 1 CP).
Nemo tenetur face à l’obligation de collaborer selon la LFINMA
Les déclarations faites à la FINMA ou à un chargé d’enquête lors d’une procédure d’enforcement durant laquelle il existe une obligation générale de collaborer peuvent être exploitées au cours d’une procédure pénale subséquente à l’encontre de la personne concernée. Celle-ci doit cependant être informée de son droit de refuser de collaborer et ne subir aucune contrainte abusive de la part de l’autorité, à défaut de quoi le principe nemo tenetur se ipsum accusare serait violé.
Le tribunal qui contrôle la levée d’une mesure thérapeuthique doit statuer en formation collégiale
Lorsqu’un recours est déposé contre une décision de levée anticipée d’une mesure thérapeutique institutionnelle (art. 59 al. 3 CP) dans le cadre d’une procédure ultérieure indépendante, l’autorité de recours doit statuer en formation collégiale. Une telle décision ne tranche pas une question d’exécution courante. Elle a, au contraire, des conséquences importantes sur la situation juridique de la personne concernée et/ou sur l’intérêt public.
Séquestration, usurpation de fonctions et droit d’arrestation par des particuliers : condamnation d’un agent de sécurité
Le droit d’arrestation par des particuliers de l’art. 218 CPP, motif justificatif applicable par le biais de l’art. 14 CP, est plus étroit que les pouvoirs de la police et il ne peut y être fait appel que lorsqu’une personne est prise en flagrant délit ou crime ou est trouvée immédiatement après la commission d’un crime ou d’un délit. De plus, les impératifs de subsidiarité et de proportionnalité doivent être observés. Le droit d’arrestation des particuliers disparaît lorsqu’il est question de choses valant moins de CHF 300.- (art. 172ter CP). Celui qui ne respecte pas les conditions de l’art. 218 CPP commet une usurpation de fonctions (art. 287 CP) et une séquestration (art. 183 CP). Le droit d’arrestation par des employés œuvrant pour une entreprise de sécurité privée est soumis aux mêmes exigences strictes que le droit d’arrestation par d’autres particuliers.
Les obligations des autorités pénales en cas de confiscation prononcée après le décès du prévenu
Lorsque le prévenu décède, la procédure doit être classée. La décision de confiscation portant sur des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu doit être notifiée aux héritiers de celui-ci. À cette fin, l’autorité pénale ne peut pas se limiter à la notifier au conseil du prévenu décédé, mais doit s’employer à rechercher les héritiers pour les introduire dans la procédure de confiscation en tant qu’autres participants à la procédure (art. 105 al. 1 let. f CPP).
La notification de l’ordonnance pénale au prévenu résidant à l’étranger
Lorsqu’une ordonnance pénale est émise à l’encontre d’un prévenu résidant à l’étranger, elle doit lui être notifiée par voie d’entraide judiciaire, sous réserve que la communication directe des décisions pénales par voie postale repose sur une convention internationale avec l’État étranger concerné. Le fait que le prévenu ait déclaré dans un formulaire qu’il choisit l’adresse du ministère public comme domicile de notification en Suisse ne peut pas être interprété comme une renonciation de facto à une opposition valable à l’ordonnance pénale si le prévenu n’était pas conscient de la portée de sa déclaration. Par ailleurs, une renonciation effective à interjeter recours ne peut intervenir qu’après la communication de la décision attaquable (art. 386 al. 1 CPP), cela valant également, par analogie, pour la renonciation à l’opposition à une ordonnance pénale.
Les recherches servant à apprécier la crédibilité d’un témoin : portée des art. 164 al. 1 et 177 al. 2 CPP
Les art. 164 al. 1 et 2 CPP ainsi que 177 al. 2 CPP règlent si et dans quelle mesure des recherches doivent être effectuées afin d’apprécier la crédibilité d’un témoin. Les recherches prévues par l’art. 164 al. 1 CPP doivent être effectuées avec retenue tant il est nécessaire de protéger la personnalité des témoins. Les antécédents et la situation personnelle d’un témoin ne doivent pas faire l’objet de recherches au sens de l’art. 164 al. 1 CPP si seuls des doutes quant à la crédibilité générale de ce dernier existent. Il doit être procédé à de telles recherches uniquement lorsque lesdits doutes sont susceptibles d’affecter l’appréciation concrète des preuves, soit la crédibilité des déclarations concrètes et juridiquement pertinentes du témoin. Les « autres circonstances » mentionnées à l’art. 177 al. 2 CPP comprennent notamment l’existence à l’encontre du témoin de poursuites pénales antérieures pour des infractions contre l’administration de la justice (en particulier pour faux témoignage, dénonciation calomnieuse ou induction de la justice en erreur). Il n’est toutefois pas obligatoire d’interroger systématiquement tout témoin à ce sujet.
Le maintien justifié d’un prévenu déjà détenu dans une prison d’exécution de peine
Le Tribunal fédéral rejette le recours d’une personne ayant demandé son transfert de l’établissement pénitentiaire de Pöschwies dans un centre de détention provisoire du canton de Zurich. À l’aune des circonstances exceptionnelles du cas d’espèce, le Tribunal fédéral estime que son placement dans l’établissement pénitentiaire de Pöschwies de manière à permettre la bonne exécution de sa détention avant jugement, respectivement de sa détention pour des motifs de sûreté est pour le moment encore justifié.
Lorsque le classement d’une procédure pénale viole la présomption d’innocence de la partie plaignante prévenue dans une procédure parallèle
La garantie de la présomption d’innocence dont jouit toute personne prévenue (art. 10 al. 1 CPP et 6 par. 2 CEDH) se trouve méconnue si les déclarations d’un organe étatique donnent à penser qu’elle est coupable d’une infraction pénale avant même que sa culpabilité n’ait été établie dans un jugement au fond. Il en va ainsi lorsqu’une autorité pénale classe la procédure dirigée contre un individu au motif d’un état de légitime défense alors que la culpabilité du second protagoniste impliqué dans l’altercation litigieuse n’a pas encore été légalement constatée. Lorsque les actes de plusieurs personnes sont à ce point liés, le ministère public se doit en effet de toutes les renvoyer en jugement afin que le tribunal matériellement compétent vérifie les éléments constitutifs des infractions en cause et, cas échéant, les conditions de la légitime défense.
L’(in)exploitabilité de déclarations à charge faites lors d’une audition menée sans la participation du prévenu
Les déclarations d’une personne appelée à donner des renseignements (PADR) faites lors d’une audition menée sans la participation du prévenu parce qu’elle a eu lieu avant l’ouverture d’une instruction, peuvent être répétées en cours d’instruction. Lors de la confrontation ultérieure, en cas de déclarations contradictoires ou de trous de mémoire du PADR, se pose la question de l’appréciation des preuves recueillies et non de leur exploitabilité. En revanche, si l’autorité pénale se borne à se référer aux résultats de la première audition ou à une confirmation formelle des déclarations antérieures ou si la personne interrogée refuse de témoigner lors de la répétition, les premières déclarations sont inexploitables car le prévenu est purement et simplement empêché d’exercer ses droits de défense de manière effective.