Les articles en droit matériel

L’art. 291 CP entre en concours parfait avec l’art. 119 cum 74 al. 1 let. a LEI

L’art. 119 cum 74 al. 1 let. a LEI a pour bien juridiquement protégé la sécurité et l’ordre publics, en particulier en matière de stupéfiants. Il se distingue donc de l’art. 291 CP qui protège l’autorité publique et vise à garantir l’exécution d’une expulsion judiciaire ou administrative. Partant, l’art. 291 CP entre en concours parfait avec l’art. 119 cum 74 al. 1 let. a LEI.

L’erreur sur les faits causée par un grave trouble mental n’est pas couverte par l’art. 13 al. 1 CP

L’auteur qui agit sous l’influence d’une erreur sur les faits (en l’espèce, une erreur sur un fait justificatif) due à un grave trouble mental (la schizophrénie) ne peut pas bénéficier de l’art. 13 al. 1 CP ; il ne peut être constaté que l’absence de responsabilité. En cas d’erreur sur les faits, il y a donc lieu de distinguer l’erreur commise en raison d’une pathologie mentale de l’erreur ordinaire, car seule cette dernière est couverte par l’art. 13 al. 1 CP.

Course officielle urgente et délit de chauffard : atténuation de peine et droit dans le temps

L’art. 100 ch. 4 LCR dans sa nouvelle teneur au 1er août 2016 ne contient pas de limitation quant à l’importance de l’atténuation de peine susceptible d’être opérée par le juge et peut être appliqué moins restrictivement que les motifs d’atténuation de l’art. 48 CP. La peine-plancher d’un an de peine privative de liberté prévue à l’art. 90 al. 3 et 4 LCR peut ainsi être réduite de trois quart sans violer le droit fédéral. Les anciennes dispositions sur le travail d’intérêt général sont plus favorables que l’art. 79a CP, de sorte que l’art. 2 al. 2 CP ne trouve pas application.

Les participants visés par une plainte pénale pour violation de domicile

Quand une infraction continue est consommée, mais pas encore achevée, la plainte pénale couvre également les faits se déroulant après son dépôt. La plainte vise ainsi tous les participants à l’infraction, notamment ceux qui interviennent après qu’elle soit déposée, à condition que le comportement auquel ils prennent part leur soit imputable conformément aux règles matérielles de la participation. En ce sens, la plainte pénale vaut également contre les coauteurs assumant un rôle décisif et les complices prêtant assistance lors de l’exécution de l’infraction continue dans une même propriété. En revanche, les auteurs directs juxtaposés (Nebentäter) commettant l’infraction avec une intention indépendante, ne peuvent se voir imputer le comportement des inconnus visés par la plainte pénale.

L’Ordonnance 2 COVID-19 ne constitue pas une base légale suffisante pour prononcer une peine privative de liberté ou une peine pécuniaire

L’Ordonnance 2 COVID-19 ne constitue pas une base légale suffisante pour prononcer une peine privative de liberté ou une peine pécuniaire. De telles sanctions nécessiteraient une loi au sens formel du terme. De plus, la notion de « biens de consommation courante » à l’art. 6 al. 3 let. a Ordonnance 2 COVID-19 (état le 9 avril 2020) n’est pas suffisamment précise pour délimiter le champ d’application d’une disposition pénale. En l’espèce, un acquittement résulte déjà d’un manque de preuves. Par ailleurs, le principe de la lex mitior (art. 2 al. 2 CP) s’applique, la condamnation par ordonnance pénale n’ayant eu lieu qu’après l’abrogation de l’Ordonnance 2 COVID-19.

La tentative d’instigation à assassinat : qualification de l’infraction, portée de l’art. 22 CP et fixation de la peine

La qualification d’assassinat au sens de l’art. 112 CP s’impose lorsque la faute de l’auteur se distingue nettement de celle d’un meurtrier au sens de l’art. 111 CP. Tel est le cas lorsque l’ensemble des circonstances révèle un mépris complet pour la vie d’autrui chez un individu guidé par la volonté de satisfaire ses besoins égoïstes. La conclusion d’un acte contractuel aux fins d’engager un tueur à gage est notamment un élément pertinent dans ce cadre. Au stade de la fixation de la peine, les conséquences des actes constitutifs de la tentative et l’absence de résultat doivent être considérées, à charge et à décharge, lors de l’application de l’art. 47 CP. Enfin, la mesure particulière dans laquelle se réalisent des circonstances aggravantes ou atténuantes ayant conduit à une extension du cadre de la peine peut être prise en compte pour déterminer la quotité de la peine, sans que ceci ne constitue une violation du principe de « Doppelverwertungsverbot ».

Le recrutement assimilé à la traite d’êtres humains

Le recrutement au sens de l’art. 182 al. 1 in fine CP est consommé dès la perte, par la victime, de son libre arbitre. L’acquéreur peut en même temps être le recruteur et doit avoir pour objectif l’exploitation de la victime. Le recrutement se comprend ainsi comme un « processus global » précédant l’exploitation de la victime et qui tend vers ce but.

Le concours parfait entre l’art. 91 al. 2, let. a cum b, LCR

Le conducteur d’un véhicule automobile qui présente un état d’ébriété qualifié (art. 91 al. 2 let. a LCR) et qui se trouve également dans l’incapacité de conduire pour d’autres raisons, comme un état de fatigue avancée (art. 91 al. 2 let. b LCR) peut être condamné pour la violation de ces deux dispositions. Le Tribunal fédéral retient ainsi un concours parfait entre ces deux normes, conduisant à l’application de l’art. 49 al. 1 CP.

Le cessionnaire d’une créance fondée sur l’infraction préalable lésé en raison d’un blanchiment d’argent postérieur à la cession

Le Tribunal fédéral précise pour la première fois que l’art. 305bis CP (blanchiment d’argent) protège également les intérêts patrimoniaux de la personne qui, bien que n’étant pas elle-même lésée par l’infraction préalable, est la cessionnaire des prétentions en dommages-intérêts résultant de l’infraction préalable.

Peine pécuniaire et lex mitior : le nouveau droit n’est pas plus favorable – vraiment ?

Le Tribunal fédéral revient sur deux jurisprudences non publiées rédigées en français dans lesquelles il avait d’office ramené à 180 jours-amende des sanctions prononcées après le 1er janvier 2018 pour des faits commis avant l’entrée en vigueur de la réforme du « nouveau » droit des sanctions. Il rappelle que l’application du principe de la lex mitior (art. 2 al. 2 CP) ne peut se faire en « panachant » l’ancien et le nouveau droit et qu’ainsi, lorsque le juge considère qu’une peine pécuniaire de 300 jours amende sanctionne de façon adéquate une infraction commise avant le 1er janvier 2018, l’art. 2 al. 2 CP ne permet pas de réduire cette peine à 180 jours-amende en application du nouvel art. 34 al. 1 CP.

Les conditions de la libération conditionnelle de l’internement

Les exigences de l’art. 64a al. 1 CP pour la libération conditionnelle de l’internement sont très strictes et la probabilité que l’auteur se conduise bien en liberté doit être élevée. L’âge et, conformément au principe de proportionnalité, les nombreuses années de privation de liberté, peuvent abstraitement être invoqués en faveur de la libération conditionnelle de la mesure d’internement. Il ne s’agit toutefois pas de critères absolus dans l’évaluation de la dangerosité d’une personne internée et ils doivent continuer à être mis en balance avec l’intérêt à la protection des victimes.