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Hors circonstance aggravante, le dépassement par la droite sur l’autoroute doit être sanctionné d’une simple amende d’ordre de CHF 250.-

La jurisprudence fédérale établie retenant que tout dépassement par la droite sur l’autoroute ou semi-autoroute avec rabattement sur la gauche est systématiquement constitutif d’une violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR) et ayant pour conséquence un retrait de permis automatique de trois mois au moins (art. 16c al. 2 LCR) ne peut être maintenue. La modification de l’art. 36 al. 5 OCR et son pendant dans l’OAO (Annexe 1 ch. 314.3) commande depuis le 1er janvier 2021 de se limiter exceptionnellement au prononcé d’une simple amende d’ordre de CHF 250.- lorsqu’aucune circonstance aggravante ne permet de retenir que le dépassement par la droite a causé une mise en danger abstraite accrue.

Infraction routière à l’étranger : la durée du retrait du permis de conduire prononcée par les autorités suisses

Le conducteur récidiviste d’infractions à la LCR ne saurait bénéficier du traitement favorable réservé aux délinquants primaires de l’art. 16c bis al. 2 LCR selon lequel la durée du retrait du permis de conduire prononcée à l’étranger ne peut être dépassée par les autorités suisses. La durée minimale du retrait est alors de trois mois (art. 16c al. 2 let. a LCR). Cela est vrai même si les délais prévus à l’art. 16c al. 2 let. b-e LCR en vertu du système dit en cascade ne trouvent plus application en raison de l’écoulement du temps.

Notification fictive d’une ordonnance pénale sans audition préalable

La fiction de la notification d’une ordonnance pénale à l’échéance du délai de garde postal (art. 85 al. 4 let. a CPP) ne vaut que lorsque le prévenu devait s’attendre à recevoir un tel acte, ce qui suppose qu’il ait été préalablement informé, de façon claire et précise, qu’il faisait l’objet d’une procédure pénale. Tel n’est pas le cas lorsque le prévenu ne fait que remplir un formulaire destiné à identifier le conducteur responsable d’un excès de vitesse, en l’absence de toute audition par la police ou le ministère public.

Toute fouille corporelle doit respecter le principe de proportionnalité

Le principe de proportionnalité est violé lorsque, pour déterminer si le prévenu était en possession d’armes ou d’autres objets dangereux, voire d’éventuelles substances illicites, il aurait suffi de le palper par-dessus ses vêtements ou d’user d’autres moyens techniques. Une fouille avec déshabillage complet et inspection visuelle de la zone intime n’est admissible que s’il existe des indices sérieux et concrets laissant suspecter que le prévenu y cache des objets ou substances dangereux ou interdits qui ne peuvent pas être détectés d’une autre manière.

Remise d’une personne par la police suisse à un État étranger en violation manifeste des règles de l’extradition : aucune conséquence

La remise d’une personne par la police suisse aux autorités allemandes, en violation de toutes les règles procédurales en matière d’extradition (compétence de l’OFJ, droit d’être entendu de la personne, analyse des conditions de l’extradition, décision sujette à un double degré de recours) n’emporte aucune conséquence.

La tentative d’instigation à commettre un crime à l’étranger non soumis à la compétence suisse est punissable

Celui qui, depuis la Suisse, instigue ou assiste à une infraction commise à l’étranger échappe à la compétence territoriale des autorités pénales suisses. Toutefois, s’il y a tentative d’instiguer à commettre un crime (art. 24 al. 2 CP), la tentative d’instigation en Suisse constitue une circonstance de rattachement propre pour déterminer le lieu de commission et fonder la compétence territoriale suisse.

Toute personne détenue administrativement en vue de son renvoi doit pouvoir accéder à Internet

La détention administrative sert à assurer l’exécution de la procédure de renvoi. Cela implique que le régime d’exécution est allégé par rapport à celui de la détention provisoire ou de l’exécution des peines privatives de liberté. Dans ce cadre, des restrictions aux droits fondamentaux ne sont admissibles que pour des motifs liés à la sécurité ou au bon fonctionnement de l’établissement carcéral. Il s’ensuit qu’un enfermement de 18 heures par jour en cellule n’est pas conforme au but et au sens de la détention en vue du renvoi et viole le droit à la liberté personnelle. Il ne se justifie pas non plus d’interdire de manière générale l’accès à Internet. Une telle interdiction constitue en effet une restriction disproportionnée aux libertés d’opinion et d’information.

Le placement préventif d’un mineur (art. 15 DPMin) ne correspond pas à une détention préventive ouvrant le droit à une indemnité fondée sur l’art. 431 al. 2 CPP

La mesure visant à placer un mineur au sein d’un établissement fermé ou chez des particuliers (art. 15 DPMin) peut aussi être ordonnée au cours de l’instruction pénale selon l’art. 5 DPMin. Une telle mesure ne correspond toutefois pas à une détention préventive « déguisée » au sens de l’art. 110 al. 7 CP. Celle-ci sert avant tout les objectifs poursuivis par le droit pénal des mineurs, à savoir la protection et l’éducation du délinquant mineur. Par conséquent, cette mesure ne donne pas droit à une indemnité fondée sur l’art. 431 al. 2 CPP, même si la durée du placement dépasse l’éventuelle peine privative de liberté prononcée.

Le ministère public n’est tenu de participer à l’audience d’appel que lorsque la peine privative de liberté encourue par la personne prévenue est de plus d’un an

L’interprétation littérale de l’art. 337 al. 3 CPP est telle que le ministère public est notamment tenu de soutenir en personne l’accusation devant le tribunal lorsqu’il requiert une peine privative de liberté de plus d’un an, ce par quoi il faut comprendre 12 mois et un jour au minimum. Aussi le ministère public est-il dispensé de participer personnellement à l’audience d’appel lorsque la personne prévenue n’encourt pas une peine de plus d’un an. Ceci vaut également dans les cas de défense obligatoire. En l’espèce, le recourant a été condamné à 12 mois de privation de liberté en première instance et lui seul a fait appel de cette décision, le ministère public n’ayant donc pas requis de peine plus élevée. Étant admis que la juridiction d’appel ne peut pas prononcer une peine supérieure (art. 391 al. 2 CPP), le ministère public est dispensé de participer à l’audience.

Lex mitior et législation sur les jeux d’argent : l’art. 56 al. 1 aLMJ est plus favorable à l’auteur que l’art. 130 al. 1 LJAr

La révision de la législation en matière de jeux d’argent avait pour but de durcir le cadre légal, notamment en transformant des infractions de contraventions en délits. L’amende qui sanctionne une contravention (comme prévu par l’ancien droit, art. 56 al. 1 aLMJ) représente une peine plus favorable que la peine pécuniaire qui sanctionne un délit (comme prévu par le nouveau droit, art. 130 al. 1 LJAr), et ce indépendamment des modalités d’exécution et de l’ampleur du montant. Dans ce cas, en application du principe de la lex mitior, l’ancien droit est plus favorable à l’auteur.

Diffamation (art. 173 ch. 1 CP) : l’avocat n’est pas « n’importe quel tiers » lorsque son client lui confie des propos attentatoires à l’honneur de la partie adverse

Les propos attentatoires à l’honneur tenus par le client lors d’un entretien avec son avocat ne sont en principe pas constitutifs d’une atteinte à l’honneur au sens de l’art. 173 ch. 1 CP. Le conseil juridique ne peut effectivement être considéré comme un simple « tiers » au sens de cette disposition, vu le climat de confiance nécessaire qui doit exister entre avocat et client. Une diffamation peut toutefois être retenue lorsque les propos tenus sont sans lien avec l’affaire pour laquelle intervient l’avocat et que ceux-ci ne tendent qu’à exposer la personne visée au mépris.

Une partie dont l’identité demeure inconnue peut emprunter les voies et moyens de droit usuels à condition d’être suffisamment « identifiable »

Dans le cadre de l’établissement de l’identité d’un prévenu, le principe nemo tenetur ne lui confère un droit à l’anonymat que de façon très limitée, notamment lorsque la divulgation de celle-ci se confond avec l’établissement de sa culpabilité. Le prévenu refusant de révéler son identité pourra néanmoins recourir et satisfaire aux conditions de formes idoines lorsqu’il emploie, à son sujet, la même désignation que celle employée par les autorités et qu’il apparaît clairement identifiable par rapport aux tiers. En ce sens, malgré le libellé de l’art. 353 al. 1 let. b CPP, la désignation du prévenu par le ministère public dans une ordonnance pénale doit être « suffisante », conformément à l’art. 81 al. 2 CPP, et surtout permettre d’éviter toute confusion avec des tiers.