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Contrôle d’identité et violation de l’art. 5 CEDH

Une détention d’une durée de 6 heures pour des motifs de contrôle de sécurité suite à une manifestation viole l’art. 5 CEDH. En effet, cette mesure a été jugée par la CourEDH comme ne respectant pas les principes de proportionnalité et de nécessité. En particulier, les autorités suisses n’ont pas réussi à démontrer l’intention des requérants de commettre un acte illégal ; elles n’ont d’ailleurs initié aucune poursuite à leur encontre.

Obtention illicite d’une prestation d’une assurance sociale ou de l’aide sociale : évaluation de l’ampleur de la faute

Lorsque le montant du délit se trouve dans la zone « médiane » au vu des seuils chiffrés par le Tribunal fédéral, il convient d’évaluer l’ampleur de la faute de l’auteur en se fondant sur l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, la durée de la période de perception illicite de la prestation étant un facteur d’appréciation pertinent. Par ailleurs, seule l’infraction d’obtention illicite de prestations sociales au sens de l’art. 148a al. 1 CP constitue un cas d’expulsion obligatoire, et non le cas de peu de gravité au sens de l’art. 148a al. 2 CP.

La responsabilité pénale des exploitants de remontées mécaniques lors d’un accident de luge

Les responsables d’exploitation des remontées mécaniques d’une station de ski ne se sont pas rendus coupables de lésions corporelles par négligence lors de l’accident d’une lugeuse qui est entrée en collision avec un piquet en bois en bordure de piste. Le devoir d’assurer la sécurité des pistes, dont l’étendue est déterminée en référence aux directives édictées par les associations de sports d’hiver et qui varie en fonction des circonstances locales, ne leur imposait pas de sécuriser davantage l’obstacle qu’avec le tapis de protection orange mis en place.

L’obligation de communiquer au sens de l’art. 37 LBA du président du CdA d’une banque

Le président du CdA d’une banque qui a eu connaissance d’éléments nouveaux qui auraient dû intensifier des soupçons dont il était au courant pourrait se voir reprocher la violation de l’obligation de communiquer prévue à l’art. 37 LBA. Dans le cas d’espèce, le Tribunal fédéral renvoie l’affaire à la Cour d’appel du Tribunal pénal fédéral pour qu’elle complète l’état de fait afin de déterminer si le président du CdA a eu connaissance de tels éléments.

Appel au boycott de l’armée face à l’art. 276 CP : le TPF fait prévaloir la liberté d’expression de militants

Dans un arrêt portant sur l’application très rare de la provocation et l’incitation à la violation des devoirs militaires, le Tribunal pénal fédéral a fait prévaloir la liberté d’expression des prévenus pour prononcer leur acquittement. D’abord condamnés par ordonnances pénales rendues par le Ministère public de la Confédération, les prévenus avaient, par la publication d’un article en ligne, enjoint leur lectorat à ne pas payer la taxe militaire, à privilégier le service civil et à ne pas se rendre au service militaire. Selon le Tribunal pénal fédéral, une publication qui participe au débat public bénéficie d’une protection accrue. En ce sens, elle ne saurait être restreinte, sans violer la liberté d’expression, que si les propos qu’elle contient exhortent à la violence ou constituent un discours de haine.

Le prononcé d’une détention pour motifs de sûreté dans le cadre d’une décision judiciaire ultérieure à l’exécution d’une peine

Le prononcé d’une détention pour des motifs de sûreté en vue ou dans le cadre d’une décision judiciaire ultérieure indépendante suppose de sérieuses raisons de penser que l’exécution d’une peine ou d’une mesure privative de liberté sera ordonnée à l’encontre de la personne condamnée (art. 364a et 364b CPP). Ce changement de sanction (art. 65 al. 1 CP) est possible uniquement si, après l’entrée en force du jugement initial, de nouveaux faits ou moyens de preuves, alors inconnus du tribunal mais déjà existants au moment du premier jugement, sont apparus et satisfont les conditions d’une mesure. Conformément à la jurisprudence de la CourEDH, ces nouveaux faits et moyens de preuve doivent porter sur la nature de l’infraction ou sur la culpabilité, et non uniquement sur les conditions du prononcé ultérieur de la mesure.

Violation de l’obligation d’entretien (art. 217 CP) : le juge pénal doit toujours établir concrètement la capacité du débiteur de s’acquitter de la contribution d’entretien (condition objective de punissabilité)

Une condamnation pour violation de l’obligation d’entretien (art. 217 CP) suppose que le débiteur dispose de moyens suffisants pour s’acquitter de ses obligations, ce qui constitue une condition objective de punissabilité. Dans le cadre de cet examen, le juge pénal doit procéder à une analyse « concrète » de la capacité financière du prévenu, en se référant si besoin aux éléments établis par le juge civil. Entrent dans la capacité financière concrète du prévenu tant ses moyens actuels que les possibilités de gain qui lui sont offertes et qu’il pourrait accepter.

Exploitabilité des preuves obtenues lors d’une fishing expedition

Les preuves obtenues lors d’une fishing expedition sont exploitables aux conditions de l’art. 141 al. 2 CPP, c’est-à-dire si l’intérêt public à l’élucidation d’une infraction grave prévaut sur l’intérêt privé à l’inexploitabilité de la preuve, à tout le moins si le grief est soulevé dans un recours contre le jugement au fond.

Les critères de fixation de la peine en cas de viol, tentative de viol et contrainte sexuelle commis en commun (art. 49 et 200 CP)  

Lorsque plusieurs actes d’ordre sexuel sont commis en commun, l’autorité de jugement doit, selon la jurisprudence rendue en application de l’art. 49 CP, fixer une sanction hypothétique pour chaque acte (avec aggravation pour commission en commun selon l’art. 200 CP) afin de déterminer la peine d’ensemble conforme à la culpabilité du prévenu. À cet égard, il est conforme au droit de tenir compte de la durée d’un viol comme facteur participant à déterminer la culpabilité au sein de l’art. 47 CP.

Prescription des poursuites pénales en raison de la lenteur de l’instruction : le procureur jugé pour entrave à l’action pénale

Le procureur qui engage l’accusation devant le Tribunal de première instance deux mois et demi avant la prescription de l’action pénale ne se rend pas coupable d’entrave à l’action pénale au sens de l’art. 305 al. 1 CP, malgré le classement subséquent de la procédure, faute pour le Tribunal d’avoir pu rendre son jugement avant l’échéance du délai de prescription. Compte tenu des circonstances, le magistrat pouvait légitimement espérer que les procédures seraient menées à terme en temps voulu. Son comportement relève de la négligence consciente et échappe à la sanction pénale.

Une attente de 17 mois entre le prononcé de l’exécution anticipée de la mesure et la mise en œuvre effective d’un traitement thérapeutique institutionnel viole l’art. 5 § 1 let. e CEDH

Le Tribunal fédéral juge qu’une attente de 17 mois entre le prononcé de l’exécution anticipée de la mesure thérapeutique institutionnelle (au sens de l’art. 59 CP) et la mise en œuvre effective de cette dernière viole l’art. 5 § 1 let. e CEDH. Cette conclusion est notamment motivée par le fait qu’une expertise psychiatrique réalisée en cours de procédure a mis en évidence l’effet néfaste d’un séjour en détention sur l’évolution de la maladie du recourant. De plus, le canton de Berne souffre d’un manque avéré de places de thérapie, ce qui implique de longs délais d’attente avant que la mesure ne puisse effectivement être exécutée. Dans ces circonstances, les autorités cantonales compétentes en matière d’exécution des peines et des mesures ne pouvaient se contenter de contacter, dans un premier temps, que trois des huit établissements susceptibles d’accueillir le recourant. Ce dernier a par conséquent droit à une indemnisation.

Délai de recours et jours fériés (GE)

En vertu de l’art. 1 al. 2 de la loi genevoise du 3 novembre 1951 sur les jours fériés (LJF ; rs/GE J 1 45), lorsque le 1er janvier tombe un dimanche, le 2 janvier n’est férié que pour les collaborateurs de certaines entreprises du canton de Genève. Cette règle ne revient pas à ériger le 2 janvier en jour férié officiel selon le droit cantonal genevois. Le recours formé le mardi 3 janvier, alors que le délai court jusqu’au lundi 2 janvier, est donc tardif en vertu de l’art. 90 al. 2 CPP.