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Toute personne détenue administrativement en vue de son renvoi doit pouvoir accéder à Internet

La détention administrative sert à assurer l’exécution de la procédure de renvoi. Cela implique que le régime d’exécution est allégé par rapport à celui de la détention provisoire ou de l’exécution des peines privatives de liberté. Dans ce cadre, des restrictions aux droits fondamentaux ne sont admissibles que pour des motifs liés à la sécurité ou au bon fonctionnement de l’établissement carcéral. Il s’ensuit qu’un enfermement de 18 heures par jour en cellule n’est pas conforme au but et au sens de la détention en vue du renvoi et viole le droit à la liberté personnelle. Il ne se justifie pas non plus d’interdire de manière générale l’accès à Internet. Une telle interdiction constitue en effet une restriction disproportionnée aux libertés d’opinion et d’information.

Le placement préventif d’un mineur (art. 15 DPMin) ne correspond pas à une détention préventive ouvrant le droit à une indemnité fondée sur l’art. 431 al. 2 CPP

La mesure visant à placer un mineur au sein d’un établissement fermé ou chez des particuliers (art. 15 DPMin) peut aussi être ordonnée au cours de l’instruction pénale selon l’art. 5 DPMin. Une telle mesure ne correspond toutefois pas à une détention préventive « déguisée » au sens de l’art. 110 al. 7 CP. Celle-ci sert avant tout les objectifs poursuivis par le droit pénal des mineurs, à savoir la protection et l’éducation du délinquant mineur. Par conséquent, cette mesure ne donne pas droit à une indemnité fondée sur l’art. 431 al. 2 CPP, même si la durée du placement dépasse l’éventuelle peine privative de liberté prononcée.

Le ministère public n’est tenu de participer à l’audience d’appel que lorsque la peine privative de liberté encourue par la personne prévenue est de plus d’un an

L’interprétation littérale de l’art. 337 al. 3 CPP est telle que le ministère public est notamment tenu de soutenir en personne l’accusation devant le tribunal lorsqu’il requiert une peine privative de liberté de plus d’un an, ce par quoi il faut comprendre 12 mois et un jour au minimum. Aussi le ministère public est-il dispensé de participer personnellement à l’audience d’appel lorsque la personne prévenue n’encourt pas une peine de plus d’un an. Ceci vaut également dans les cas de défense obligatoire. En l’espèce, le recourant a été condamné à 12 mois de privation de liberté en première instance et lui seul a fait appel de cette décision, le ministère public n’ayant donc pas requis de peine plus élevée. Étant admis que la juridiction d’appel ne peut pas prononcer une peine supérieure (art. 391 al. 2 CPP), le ministère public est dispensé de participer à l’audience.

Lex mitior et législation sur les jeux d’argent : l’art. 56 al. 1 aLMJ est plus favorable à l’auteur que l’art. 130 al. 1 LJAr

La révision de la législation en matière de jeux d’argent avait pour but de durcir le cadre légal, notamment en transformant des infractions de contraventions en délits. L’amende qui sanctionne une contravention (comme prévu par l’ancien droit, art. 56 al. 1 aLMJ) représente une peine plus favorable que la peine pécuniaire qui sanctionne un délit (comme prévu par le nouveau droit, art. 130 al. 1 LJAr), et ce indépendamment des modalités d’exécution et de l’ampleur du montant. Dans ce cas, en application du principe de la lex mitior, l’ancien droit est plus favorable à l’auteur.

Diffamation (art. 173 ch. 1 CP) : l’avocat n’est pas « n’importe quel tiers » lorsque son client lui confie des propos attentatoires à l’honneur de la partie adverse

Les propos attentatoires à l’honneur tenus par le client lors d’un entretien avec son avocat ne sont en principe pas constitutifs d’une atteinte à l’honneur au sens de l’art. 173 ch. 1 CP. Le conseil juridique ne peut effectivement être considéré comme un simple « tiers » au sens de cette disposition, vu le climat de confiance nécessaire qui doit exister entre avocat et client. Une diffamation peut toutefois être retenue lorsque les propos tenus sont sans lien avec l’affaire pour laquelle intervient l’avocat et que ceux-ci ne tendent qu’à exposer la personne visée au mépris.

Une partie dont l’identité demeure inconnue peut emprunter les voies et moyens de droit usuels à condition d’être suffisamment « identifiable »

Dans le cadre de l’établissement de l’identité d’un prévenu, le principe nemo tenetur ne lui confère un droit à l’anonymat que de façon très limitée, notamment lorsque la divulgation de celle-ci se confond avec l’établissement de sa culpabilité. Le prévenu refusant de révéler son identité pourra néanmoins recourir et satisfaire aux conditions de formes idoines lorsqu’il emploie, à son sujet, la même désignation que celle employée par les autorités et qu’il apparaît clairement identifiable par rapport aux tiers. En ce sens, malgré le libellé de l’art. 353 al. 1 let. b CPP, la désignation du prévenu par le ministère public dans une ordonnance pénale doit être « suffisante », conformément à l’art. 81 al. 2 CPP, et surtout permettre d’éviter toute confusion avec des tiers.

Concours imparfait entre l’instigation à l’infraction contre le patrimoine et le recel commis subséquemment

Le Tribunal fédéral modifie sa jurisprudence relative au concours entre l’instigation à l’infraction contre le patrimoine et le recel commis subséquemment, en bonne application de la théorie de la participation à l’illégalisme (Unrechtsteilnahmetheorie). Le recel constitue un acte subséquent non punissable (straflose Nachtat) coréprimé (mitbestrafte) par l’instigation à l’infraction contre le patrimoine commise préalablement.

Internement pour participation à une organisation terroriste ?

L’art. 2 LAQEI vise à protéger la sécurité publique avant la commission d’infractions et recule la répression avant le seuil de la tentative punissable. Partant, celui qui viole cette norme n’a ni porté ni voulu porter gravement atteinte aux biens juridiques que sont l’intégrité physique, psychique ou sexuelle au sens de l’art. 64 al. 1 CP. L’internement représentant une pure mesure de sûreté et l’ultima ratio, son prononcé n’entre donc pas en ligne de compte pour la seule participation à une organisation terroriste.

L’utilisation du compte « réservé » d’un détenu afin de financer en partie ses frais de santé n’est pas contraire au droit

Le condamné doit participer aux frais d’exécution de la sanction dans une mesure appropriée par compensation de ceux-ci avec les prestations de travail. Il revient aux cantons de préciser les modalités de participation (art. 380 al. 2 let. a et al. 3 CP). Les cantons peuvent prévoir dans leur législation, sans violer le droit fédéral, qu’une partie de la rémunération du détenu soit prélevée de son compte « réservé » afin de financer ses frais de santé non couverts. Le montant prélevé doit toutefois respecter le principe de la proportionnalité et ne doit dès lors pas empêcher le détenu de subvenir à ses besoins personnels, ni l’entraver dans son épargne en vue de sa libération.

État de nécessité et circulation routière

L’automobiliste qui roule à 200 km/h sur une autoroute – comportement constitutif d’une violation grave qualifiée des règles de la circulation routière (art. 90 al. 3 et 4 LCR) – pour que sa femme, en proie à des douleurs cardiaques, puisse prendre ses médicaments laissés à la maison ne peut pas être mis au bénéfice d’un état de nécessité (art. 17 CP) en raison du grave danger qu’il fait courir aux autres usagers de la route et de la présence d’un hôpital à proximité.

Le refus de la remise en vue de confiscation des avoirs sur lesquels une autorité étrangère estime qu’une personne condamnée exerce un pouvoir de disposition

La voie de la remise en vue de confiscation de l’art. 74a EIMP n’est ouverte que si la mesure prononcée à l’étranger correspond à une confiscation d’après le droit suisse. Si l’autorité étrangère prononce la confiscation des avoirs sur lesquels elle considère que la personne exerce un pouvoir de disposition, seul l’art. 72 CP entre en considération. Cette disposition implique que la personne participe à une organisation criminelle ou qu’elle la soutient au sens de l’art. 260ter CP. Une confiscation à ce titre n’est pas envisageable si tel n’est pas le cas.

Le TF tranche une controverse : les prétentions contractuelles ne peuvent pas faire l’objet d’une action civile par adhésion

Le Tribunal fédéral tranche pour la première fois que les prétentions contractuelles ne peuvent pas faire l’objet d’une action civile par adhésion à la procédure pénale. Elles sont exclues du champ d’application de l’art. 122 al. 1 CPP. Concernant les conclusions civiles fondées sur un acte illicite, le TF précise que si le prévenu est acquitté car l’élément constitutif subjectif de l’infraction fait défaut, le juge pénal peut statuer sur ces conclusions de nature civile si le comportement reproché au prévenu constitue un acte illicite au sens de l’art. 41 CO. En revanche, si l’acquittement résulte de la non-réalisation d’un élément constitutif objectif de l’infraction, les conclusions civiles doivent être rejetées.