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Un délai d’attente de presque un an entre la mise en accusation et les débats de première instance viole le principe de célérité
Dans le cadre d’une affaire sans complexité particulière dans laquelle un prévenu est détenu, un délai de presque une année entre la mise en accusation et les débats de première instance viole le principe de célérité (art. 5 CPP). Lorsqu’une date d’audience a été fixée et qu’il est prévisible que cela entraîne un retard injustifié de la procédure, l’autorité de contrôle de la détention (« Haftgericht »), saisie suite à une demande de mise en liberté présentée par le détenu, ne peut pas se contenter de seulement constater qu’aucune violation du principe de célérité n’est encore intervenue au moment où elle prend sa décision.
La représentation du prévenu en matière de contraventions
Les cantons peuvent prévoir une dérogation au monopole des avocats dans les procédures portant sur les contraventions (art. 125 al. 7 CPP). Toutefois, la dérogation doit être prévue de manière expresse par le droit cantonal. Tel est le cas du canton de Zurich. En revanche, dans le canton de St-Gall, on ne peut pas déduire du droit cantonal que la représentation non professionnelle en matière de contraventions est admissible, faute de disposition suffisamment claire à ce propos.
Complément ou clarification d’une expertise psychologique et actes d’ordre sexuel avec des personnes hospitalisées
Pour déterminer le seuil à partir duquel une exploitation du rapport de dépendance au sens de l’art. 192 al. 1 CP est réalisée, il faut examiner le rapport de dépendance en tant que tel. Plus l’infériorité de la personne dépendante est élevée, plus il y a lieu de retenir une exploitation parce que la liberté de décision ou la capacité de se défendre de la victime dépendante est limitée et sa docilité plus élevée. De plus, le consentement inhérent à l’exploitation d’un rapport de dépendance ne suffit pas à exclure la punissabilité de l’auteur. En effet, la personne dépendante ne jouit plus entièrement de sa liberté de choix en matière sexuelle. Si la victime consent aux relations sexuelles, même explicitement, l’auteur demeure punissable si le rapport de dépendance a entraîné la docilité de la victime. Le fait que l’auteur initie le contact sexuel constitue un indice supplémentaire d’une exploitation du rapport de dépendance de la victime, malgré son éventuel consentement valablement exprimé.
Durant la procédure d’investigation policière, le défenseur a le droit de participer à l’audition du prévenu uniquement
Le droit des parties d’assister et de participer à l’administration des preuves ne vaut que devant le ministère public et les tribunaux, et non durant la phase d’investigation policière. Les défenseurs peuvent quant à eux participer à l’administration des preuves par la police durant la procédure d’investigation, mais ce droit est limité à l’audition de leurs clients prévenus uniquement, le but étant d’assurer au prévenu l’assistance d’un avocat et non pas de garantir à la défense un droit de participation.
Viol : la prise en compte du refus de consentir à des rapports sexuels
On ne saurait reprocher à la victime d’un viol (art. 190 CP) qui a clairement manifesté son refus d’avoir des rapports sexuels le fait que son opposition n’ait été que verbale. L’absence de réaction physique de la victime n’est pas décisive en soi, en particulier lorsque, au vu des circonstances globales, il se justifie de considérer que la crainte fondée par le caractère violent et impulsif de l’auteur empêche la victime de s’opposer d’une autre manière. Cela vaut quand bien même il n’y a eu ni menace, ni violence.
Compétence exclusive de l’autorité de recours (art. 20 CPP) lors d’une demande de récusation visant le ministère public (art. 59 al. 1 let. b CPP)
L’art. 59 al. 1 let. b CPP prévoit la compétence exclusive de l’autorité de recours (art. 20 CPP) pour connaître d’une demande de récusation visant le ministère public, notamment lorsque la cause est pendante devant le tribunal de première instance. Ce dernier n’est donc pas compétent dans une telle hypothèse contrairement à ce que retenait la jurisprudence cantonale zurichoise.
Procédure pénale suisse ouverte à la suite d’une demande d’entraide étrangère : quel droit d’accès du prévenu ?
Le prévenu dans une procédure pénale suisse ouverte à la suite de la réception d’une demande d’entraide étrangère ne peut avoir accès au dossier de la procédure d’entraide, même s’il soupçonne que les informations ayant donné lieu à sa mise en prévention ont été obtenues en violation des règles de l’entraide.
De l’extradition accordée à la Russie et des garanties diplomatiques données
Les garanties diplomatiques ont pour but de parer au danger que la personne à extrader soit exposée à des mauvais traitements dans l’État requérant. Lorsqu’il s’agit de déterminer si les garanties fournies par l’État requérant sont suffisantes, l’on doit tenir compte de onze facteurs émanant de la jurisprudence de CourEDH. Dans le cas d’un banquier russe recherché par la Russie, les garanties diplomatiques fournies sont aptes à sauvegarder les droits fondamentaux du recourant, en particulier la connaissance du lieu de détention préalablement à l’extradition et sa localisation en une certaine région, ainsi que le monitoring mis en place. De surcroît, il ne s’agit ni d’une personne exposée politiquement ni d’un membre d’une communauté victime de persécution politique ou de discrimination.
L’intérêt juridique à recourir contre un refus de retrait de moyens de preuve du dossier pénal
Le refus du ministère public d’écarter des moyens de preuve prétendument inexploitables du dossier pénal crée un « intérêt juridiquement protégé » au sens de l’art. 382 al. 1 CPP pour celui qui entend contester cette décision. Un recours au sens des art. 393 ss CPP est par conséquent ouvert, sans qu’il ne soit nécessaire d’établir un « préjudice irréparable » aux termes de l’art. 93 LTF.
Contenu de l’acte d’accusation et appréciation des preuves (« déclarations contre déclarations ») relatives à un viol
Lorsque l’acte d’accusation ne décrit pas les viols reprochés au prévenu de manière individualisée mais expose, de façon globale et détaillée, un seul mode opératoire, le principe d’accusation (art. 9 CPP) est respecté s’il peut être déduit de cet acte que la manière d’agir s’applique pour l’ensemble des infractions. Sous l’angle temporel, il est suffisant que les faits soient circonscrits approximativement. Enfin, dans le cas où les déclarations de la victime sont le principal élément de preuve à charge et s’opposent à celles de l’accusé (« déclarations contre déclarations »), il n’est pas arbitraire pour le tribunal de fonder sa conviction sur une pluralité d’éléments ou d’indices convergents si leur rapprochement permet de déduire de manière soutenable l’état de fait retenu.
Comblement d’une lacune proprement dite aux art. 269 al. 2 CPP et 66a CP par rapport à l’art. 2 LAQEI
Bien que le catalogue respectif des art. 269 al. 2 CPP concernant les mesures de surveillance secrète et de l’art. 66a CP au sujet de l’expulsion obligatoire contienne l’art. 260ter (a)CP incriminant l’organisation criminelle (et terroriste), tel n’est pas le cas de l’art. 2 LAQEI (Loi fédérale interdisant Al-Qaïda et l’État islamique). L’interprétation des art. 269 al. 2 CPP et 66a CP conduit toutefois à retenir que l’absence de l’art. 2 LAQEI est une lacune proprement dite qui doit en conséquence être comblée modo legislatoris par l’autorité judiciaire (art. 1 al. 2 CC).
La détermination de l’âge du prévenu en procédure pénale
La détermination de l’âge en procédure pénale, qui est une question de fait devant le Tribunal fédéral, peut se fonder sur les constats du SEM et sur une expertise d’âge. L’expertise d’âge peut être sollicitée d’un expert permanent officiel (art. 183 al. 2 CPP) sans interpellation préalable du prévenu.